Images Audacieuses




Les Images Audacieuses sont à la fois image et son. Ces fichiers hybrides, qu’on peut voir ou écouter selon qu’on leur attribue une extension .wav ou .pdf permettent de voir ce qu’on écoute, ou d’écouter ce que l’on voit. Et si ces images sont dites “audacieuses”, c'est parce qu’elles ont été conçues à partir du logiciel libre d'édition sonore Audacity.

Le principe de l’image sonorisée et de son corollaire, le son dessiné, s’inspire des recherches artistiques de l’avant-garde russe comme des premières expérimentations cinématographiques de Rudolf Pfenninger, l’ingénieur et réalisateur allemand qui mit au point en 1929 la technique du Graphical Sound, consistant à intervenir graphiquement sur la piste sonore optique d'une pellicule 35mm pour ensuite la jouer via un synthétiseur optique. D’autres, à l’instar d’Oskar Fishinger et ses “ornements sonores”, de Norman McLaren au début des années 1950, puis de Daphné Oram et ses “Oramics” dans les années 1960, se sont également intéressés au son dessiné. On recommande d’ailleurs le documentaire “À la Pointe de la Plume” sur le travail de Norman McLaren, qui explique très bien le procédé.

“On trace des traits et des taches de diverses formes sur la bande sonore d’une pellicule de 35mm vierge. Le rapprochement des traits détermine la hauteur du son : plus ils sont rapprochés, plus le son est élevé. L’épaisseur des traits assure le volume : plus ils sont gras, plus le son est fort. D’autre part, la densité de l’encre peut aussi modifier le volume. L’encre de Chine produit un son fort, l’encre pâle un son faible : le timbre du son dépend de la forme des traits et des taches. Les formes arrondies produisent des sons veloutés, les formes xxxxxxxxxx des sons aigres.” André Martin, dans Jean Mitry, Le cinéma expérimental, histoire et perspectives (Paris, Seghers/cinéma 2000, 1974, p.188), cité par Philippe Langlois dans Dessiner les sons.


Le procédé que j’ai mis au point relève cependant avant tout du databending (le pliage de données), et plus précisément de l’esthétique glitch d’un Antonio Robert qui, le premier, a “bendé” Audacity.

J’ai poussé cette logique pour m’intéresser au principe d'équivalence qui s'opère quand l’on transite de l’image au son et vice-versa. Que se passe-t-il quand on applique un effet sonore sur un fichier image pour en voir la répercussion visuelle et que l’on intervient sur le résultat pour en entendre la répercussion sonore ? L’effet audio de l’écho, appliqué à une image, produit ainsi la répétition de celle-ci en surimpression.